D’abord perte de zone de confort
Plus le fauteuil confortable
Plus le corps qui sait
Le corps ne sait pas, il n’a pas appris
D’abord le trouble
Du langage
Du goût de l’air
De la couleur des murs et des portes des maisons
D’abord les yeux écarquillés toujours
La tête qui mélange, qui presse, qui retourne les pensées
dans tous les sens
D’abord le vide, le saut
La chute
La poitrine contre le sol, les deux bras en avant, paumes
appuyées sur le carrelage
D’abord on essaye de se sauver, de se protéger, de respirer
avec le ventre plutôt que la poitrine
On se recroqueville en pensant « bientôt je vais à
nouveau exister », mais pas tout de suite, pas maintenant
On se tait, on écoute
Tout, tout le monde
Avec la même intensité, avec le même désir de percevoir
chaque mot
Chaque intention
Chaque détail
Toi tu as une bouche ronde et tu fais claquer ta langue sur
tes dents quand tu racontes
Toi tu parles si vite si vite
Toi tu manges tes mots, comme un gâteau avec plein de crème
Toi tu aimes parler, tu aimes dire des choses que je ne
comprends pas encore
Alors je me raconte une histoire, ma propre histoire avec
ces mots que je ne comprends pas
Pas encore
Je me raconte l’histoire que je veux
Je dis en moi-même, je pense
Que « Tout est parfait »
Que je suis extérieure à cette harmonie
Que je n’existe pas encore
Que je dois naître de moi-même pour exister
Je me dis aussi que je vis ça parce que je l’ai choisi
Je l’ai fais parce que j’en avais envie et pas parce qu’on m’y
a forcée
Je ne quitte pas mon pays parce que c’est la guerre
Je le quitte parce que c’est à moi que je déclare : « quelle
est la prochaine bataille ? »
Et ça, je me dis, ça,
c’est vraiment une chance incroyable
Après, en me disant tout ça, je transforme
Je me transforme en moi-même à nouveau
Mais avec une nouvelle musique
De nouvelles sonorités pour dire
De nouvelles images pour décrire
Je ne suis plus vraiment la même et pourtant jamais été
autant moi
Parce qu’ici
Pas de barrière
Pas de filet
Rien
C’est en sautant que le parachute apparaît
C’est en tombant avec la poitrine qui gronde
Tu peux choisir de ne pas atterrir trop vite
Tu peux choisir de faire de ta chute quelque chose de
précieux
Tellement précieux
Comme un point de départ qui ne s’arrête jamais
Un work in progress dans les airs
Ensuite tu rencontres
Tu enlaces
Tu danses
Tu embrasses
Tu vis chaque jour, et parfois tu ne sais plus bien
Si c’est jeudi gris ou dimanche plein d’espoir
Tu mélanges
Tu t’en fous
Tu lâches
Tu respires
Peut être un peu différemment cette fois
Avec plus de calme
Avec plus de confiance
Parce que ça y est :
Tu l’as fais
Et que tu sens tout au fond
Que c’est le début d’un grand voyage