Il
n'est rien de comparable à ce que ton nom fait résonner en moi
Je
suis née en toi
En
ton ventre de mousse
Ta
citadelle de pierre
Tes
ruelles étroites
Et
ton parfum de fleur joyeusement fanée
Je
foule inlassablement ta peau dure qui sait tout de moi
Tu as bercée mes amours de tes bras maternants
Tu as bercée mes amours de tes bras maternants
Tu
m'as nourri de ton sein vert
Paisible
En
me cachant parfois sous tes ponts
Tes
murs épais et tes draps tièdes
Assoiffée encore
Ton
liquide de miel et de sang a coulé le long de ma gorge
Me
rendant folle de tes lumières qui dansent
De
tes notes de guitare ou de bavardages insensés
-Mais
tellement essentiels-
D'autres
âmes perdues
Je
ne compte plus toutes ces joies colorées par la nuit
Ces
imprudences
Ces
pièges délicieux qui m'ont rendue femme
Parfois
grande
Parfois
tendre
Endolorie
de cette culture que l'on transgresse
Que
l'on regarde pousser sans savoir
En
tes kiosques j'ai vu le peuple qui grondait
J'ai
entendu sa voix fragile
J'ai
eu tant d'espoir et tant de peines
Tes
silences m'ont guidée dans la brume
Tes
reflets dorés dans l'eau
A
l'aube
Effrontée
Insaisissable
sous tes remparts
Tu
as observé toute cette chair s'affairant
S’essoufflant
sur tes plaines
Dans
tes forêts et tes églises
Maintenant
je dois te dire
Que
je m'apprête à te quitter
Cet
amour me dépasse
Et
je dois apprendre à t'aimer autrement
A
t'aimer de plus loin
De
plus haut
La nuit
J'entends
tes râles graves de femmes qui pleurent
Celles
qui ne comprennent plus mais qui se tiennent droit
Celles
qui sont grandes et fortes le jour
Brillantes de mille étoiles quand la rosée enfin s'évapore
Te
quitter sera difficile
Mais
si je souhaite encore ressentir ta beauté en fermant les yeux
Je
dois me délivrer de tes bras accueillants
Ces
derniers mois dans tes entrailles pour clôturer le cycle de ma
première vie
Tu
seras ma petite mort
Tu
seras belle dans mon cœur d'enfant grandi trop vite
Tu
seras fière
Orgueilleuse
Maquillée
de tes rames de tramway turquoises
De
tes musées
De
tes théâtres
Tu
sais que c'est dans tes salles sombres que j'ai appris à aimer l'Art
A
le détester aussi parfois
Tu
sais que c'est sur tes scènes
Dans tes bars et tes rues
Que
ma voix s'est envolée
Comme
un oiseau qui tombe de son berceau trop petit
Tu
sais comme je te dois tout
Comme
tu es en moi
Et
comme aucune autre mère ne pourra te voler ces fruits rares
Je
reviendrai
Chargée
de nouvelles victuailles
Chargée
de pierres précieuses
Que
je déposerai sur tes dalles noircies par la vie qui grouille
Sans
moi
Loin
de moi
Mais
toujours
-Et
peut être même plus intensément-
En
moi.
Ton
enfant des rues,
G.